Carnet

CARNETS | marie deschênes

26 déc. 2011

l'existence des os
etc.

(continuez de parler, ça m'intéresse)

18 déc. 2011

Patauger dans la Leberknöde Suppe
tenter d'y voir des étoiles
ne voir que ses pieds;
le fou a mangé le doigt.

17 déc. 2011

guerre; le monde qui explose la forme de ta tête qui prend la forme du monde

Note à moi-même


pour la liberté;
comprendre le monde (les limites)
non,

et la liberté;
comprendre les limites (le monde, je disais), s'y mouvoir avec aisance et légèreté (habiter, être parmi).

(oui est un pays agréable)

*

Ne pas toujours vouloir exploser les limites; Marie,
(extérieures / intérieures)
pour les accidents de vitesse, il y a l'art
(les fenêtres dans le vide).



15 déc. 2011

J'avais, pour ajouter à l'Über-jus continuel de ma paisible existence,
fait un Instant Book, cet automne, pour l'excellent Matt Prins.
Matt est un ami et écrivain qui fait, entre autres choses, des petits livres instantanés
à l'humour cynique, autodérisoire et aux dessins naïfs. Il a demandé à 26 artistes et écrivains de participer
à la deuxième édition des ALPHA Books, genre de calendrier de l'avant qui se fiche de la règle
et qui se base sur les lettres de l'alphabet, question de n'avoir aucun rapport avec les jours du mois.
J'étais la lettre D, mon petit livre sera publié aujourd'hui ici :
http://instantbooks.wordpress.com/

lien direct à mon book :
Don’t Fence Marie In by Marie Deschênes

6 déc. 2011

J'en aurai bientôt long à dire sur l'ennui
et tout le temps pour le dire
et m'ennuyer.
(la perspective se multiplie)

4 déc. 2011

épuiser les possibles n'est pas possible


J'écrirai un livre, très beau
(il faut multiplier les fenêtres sur le monde, c'est important)
chanterai quelques chansons
danserai une très longue et violente danse.
Ensuite, je pourrai partir
me laisser dériver
dans un train ou la folie;
les paysages changeants.

2 déc. 2011

L'indifférence ne mène pas au suicide,
meuh non - cette violente prise de position
face au monde (le ridicule se dévoile toujours à qui se tient dehors).
La mort se vit ici plutôt à chaque jour,
parmi l'avortement des possibles,
dans la laideur ou la beauté du monde;
mourir en ne mourant pas,
le labeur élégant d'un autre Sisyphe.
La joie, aube étrange, surgit tout de même parfois, lumineuse
musique parmi l'inénarrable tristesse.

25 nov. 2011

combien de centaines de jours
à ne pas savoir broder

22 nov. 2011


Extrait journal - 29 avril 2011

J'aimerais vivre dans un train. [..] il n'y a rien comme cette exquise sensation du monde qui passe qui va qui part qui peut-être dérape, ce mouvement, vide, léger, sans sens. La signification est un poids qu'on accroche aux choses. Elle n'a rien de l'image, elle n'a rien du chemin. Elle n'est qu'arrêt.

Peut-être j'étudie la philo pour faire le ménage, dompter les mots. Peut-être que je réussis bien car je me méfie d'eux. Toujours je les approche avec doute et méfiance. Toujours je me méfie de leur surface. J'aimerais voir derrière, là où il n'y a rien qui cache et qui obscurcit, là où il n'y a rien.
J'ai toujours été intimidée par les gens qui parlaient en forme de livre, utilisant trop de mots, érudits, tellement de références que le discours prenait toute la place de ce dont ils parlaient. Je pense à la bouche immense de *** à la Buvette chez Simone, de laquelle sortait une pâte opaque de mots contenant des tonnes de choses qui n'existent peut-être pas ailleurs que dans sa bouche à ce moment-là. Et je pense à *** qui s'amuse avec la dentelles des mots, la soulève, les fait rougir, et sourit, et s'amuse. Toujours je m'égare dans ces surfaces, je ne sais pas comment y entrer, dans le jeu de la plastique. Je reste là devant, muette, comme un petit animal sauvage, fascinée mais en même temps interpellée ailleurs, derrière tout ça, qu'est-ce qu'il y a parmi, dedans, hors de, là où. Comme les chats intrigués par l'image des télés, qui vont derrière voir ce qu'il y a.
Et lorsqu'enfin je crois qu'il n'y a rien qui suivra cette attente – parce que pour moi toujours cela cache quelque chose, n'est que prélude - , soudain je m'ennuie et déçue, je m'éloigne.

*

Ceci dit, nous voilà en novembre, et je n'ai toujours pas trouvé ma roche grise parmi les roches grises. Celle qu'il faut choisir car elle décidera de notre sort.
Pourquoi me sont-elles toutes équivalentes?
Quel ennui, le monde.
Dessiner des paysages avec les roches est tellement plus intéressant qu'en choisir une.

19 nov. 2011

Godot

VLADIMIR - Alors, on y va?
ESTRAGON - Allons-y.


Ils ne bougent pas.

Rideau.

17 nov. 2011

j'allais écrire un poème mais cette lettre dit la même chose alors à quoi bon

14.3.10

lettre à Isaiah

c'est en dandys que nous nous noierons cher ami
dans un spleen aquoiboniste sans aucune ambition
insupportables et las
regardant le monde courir à sa perte avec indifférence
loin de la vulgarité du travail et de l'ambition
nous passerons notre temps
à palabrer à citer cioran avec inexactitude à trouver le monde laid
nous perdrons notre temps
dans les églises les musées et les bistrots
parce que l'ami
qu'y a-t-il d'autre que ça
dieu l'art et le vin
c'est un peu la même chose

15 nov. 2011

Méduses siamoises! Qu'on leur coupe les têtes!




voilà ce qu'on fait aux reines mélancoliques
qui refusent leur trône et ne croient en rien ;
lune tête coupée

11 nov. 2011

Épousai l'absence parfois me retrouve
en sa compagnie, compagne de nulle part
chercher n'a pas tellement besoin d'objet
tant que l'on s'égare, on peut être certain
que l'on cherche
No habrá nunca una puerta. Estás adentro
Y el alcázar abarca el universo
Y no tiene ni anverso ni reverso
Ni externo muro ni secreto centro.
(...)

[Jorge Luis Borges] Laberinto

9 nov. 2011

Le désordre, laideur quelconque du monde, comme une marée me monte au bord des yeux, des lèvres, des dents, de la gorge jusqu'à l'estomac ; un désordre si fin, microscopique, pourtant si parfaitement et uniformément répandu dans la structure du monde, un grain de sable dans un rouage, un virus passant entre les organes, une faille au cœur de la poutre, craquant, à peine perceptible, mais que j'entends où que je sois, et qui fait que tout lentement, éternellement, inlassablement s'écroule. J'entends le monde s'écroule, comme l'édifice dans lequel j'habite, rue Edouard-Charles, craque la nuit ; ses fondations pourries, ses murs dans lesquels poussent d'étranges champignons dont personne ne veut s'occuper, qui ne sont ni la responsabilité du propriétaire ni celle du locataire. Je ne supporte pas le monde ; les grincements de son impossiblement lente agonie me tiennent éveillée dans la plus constante inquiétude ou bien me plonge dans le plus profond ennui. Ne pas pouvoir sortir d'ici.

8 nov. 2011

Sauternes à minuit et l'amant qui se tait
moi je ne parle qu'en squelette je n'ai pas de chair
autour de mes os nous valsons un vent passe nous défait
je ne sais rien que refaire faire avec me glisser
sous quelque vie trouvée ça n'a pas d'importance
étrangère au pays une ligne divergente, je dessine
le paysage en n'étant pas làe
où il faudrait que je sois.


M.C. Escher

5 nov. 2011

"Va jusqu'au bout de tes erreurs, au moins de quelques-unes, de façon à en bien pouvoir observer le type. Sinon, t'arrêtant à mi-chemin, tu iras toujours aveuglément reprenant le même genre d'erreurs, de bout en bout de ta vie, ce que certains appelleront ta "destinée". L'ennemi qui est ta structure, force-le à se découvrir. Si tu n'as pas pu gauchir ta destinée, tu n'auras été qu'un appartement à louer."

[ Henri Michaux ] - Poteau d'angle

30 oct. 2011

«Tous ces siècles, les femmes ont servi de miroirs, dotés du pouvoir magique et délicieux de refléter la figure de l'homme en doublant ses dimensions naturelles.»

"For it needs little skill in psychology to be sure that a highly gifted girl who had tried to use her gift for poetry would have been so thwarted and hindered by other people, so tortured and pulled asunder by her own contrary instincts, that she must have lost her health and sanity to a certainty."

[ Virginia Woolf ] - Extraits de Une chambre à soi

29 oct. 2011

27 oct. 2011

Coin St-Laurent St-Joseph
y'a beaucoup d'artistes
et pas beaucoup d'art
l'autre le vieux poète
disait ça aussi il y a 10 ou 15 ans
on a fait du chemin depuis
6 ou 7 coins de rue au nord
mais le paysage est resté le même.

25 oct. 2011

On ne devient jamais une œuvre d'art que contre son gré.
Je ne veux pas appartenir. Je
trouverai toujours la sortie
même si elle mène plus loin en dedans.

21 oct. 2011

12 oct. 2011

J'espère écrire ici bientôt. Je suis occupée ailleurs, j'écris pour d'autres silences, d'autres distances.
J'aimerais écrire sur la danseuse et lieu - combien fin et sensible mon rapport au lieu a toujours été, depuis l'enfance.
Mais la mélancolie de l'écriture : créer des lieux que mon corps ne pourra jamais habiter. Parfois je ne peux plus écrire.
Je vais au studio, cette autre solitude ; le corps dans l'espace vide, tenter de l'habiter.
Traces perdues, je n'y laisse aucune, si légère. Il m'est plus facile de laisser se perdre derrière moi, le plus souvent, de ne pas garder ; dévorer le temps qui me dévore, me perdre en pirouettes - tourner le dos au miroir, au regard le plus dur qui soit - et tourner le corps vers le monde, le monde en soi, le mouvement, m'écouler avec le temps. Il y a si peu à dire sur la danse. Il y a surtout beaucoup à vivre.
J'écrirai plus quand je danserai moins, quand encore une fois je danserai mal.
Quand je n'arriverai plus à habiter le monde avec légèreté, silencieusement.

26 août 2011

Lui c'est celui à qui je dis je t'aime
il est parti tout à l'heure m'a dit je reviens je te
téléphone dès que j'arrive j'ai dit
d'accord. La grande bibliothèque est déserte
et calme je peux m'égarer dans les poèmes
d'un autre pendant que lui n'est pas là
un autre qui ne me parle pas à qui je ne dis pas
je t'aime je peux demeurer silencieuse
et partir quand je veux. Celui à qui je dis je t'aime
m'appelle j'ai éteint quelque chose
en moi pour que la sonnerie ne m'atteigne plus
même si elle sonne c'est une reproduction de ces vieilles sonneries
d'un autre temps je suis tellement romantique
vieille rouillée grinçante je n'entends plus
ce qui sonne mon jules je t'aime tant de fois je t'aime
qu'on ne l'entend plus mon amour
m'appelle mais j'écris ce poème.

2 août 2011

Lettre à personne

Guillaume, mon guillaume, de vous il n'y a plus de traces
mes amis leurs claires carcasses
vides me font valser
parmi l'absence de lilas ce n'est pas Paris ce n'est pas
encore l'automne
ce n'est que l'antépénultième saison
la saison avant la saison de l'attente ils ont des épaules dignes
aux lignes fines et noires mais au-dessus d'eux
à peine un brouillard très haut très léger
l'orage se retient quelque part ailleurs
en Nouvelle-Guinée, peut-être
en Chine dans les forêts
d'Amazonie où je ne me trouve pas.
Ici je n'attends plus.

13 mai 2011

lettre à personne

Un jour nous partirons à bord d'un Orient-Express décrépit, de Londres vers Istanbul.
Le soir nous boirons du sauternes, je porterai ma sombre robe de guipure.
Le matin dans notre petit salon nous lirons les journaux anglais et ceux des pays que nous traverserons, nous mangerons peu et ne parlerons pas.
L'après-midi je me parfumerai et nous boirons le thé en discutant, citant les poètes, les philosophes que nous avons mille fois cités mais qui jamais ne s'épuisent.
Le paysage à côté de nous sera changeant et léger.
La plupart du temps, nous ne ferons rien. Nous regarderons le monde passer
et les jours s'écouleront au rythme des robes, des montagnes, des livres et des parfums.
Tout ne sera que mélancolie, lenteur dans la vitesse, des ailleurs qui nous portent.

Vous tomberez brièvement amoureux d'une voyageuse
française ou arménienne, qu'importe
dont vous retrousserez les jupons aux heures bleues alors que je dors.
Moi, je n'aimerai personne et mon cœur sera léger.
Nous serons un peu triste et nous vivrons plus
que tout ce monde que nous laisserons derrière.

Quand nous arriverons à Istanbul, il y a aura l'incertitude et la fatigue, l'émerveillement et l'ennui. Nous n'aurons plus d'argent pour l'hôtel, nous errerons dans les rues. Nous boirons du thé très sucré et très fort sous le soleil plombant, en costard tout de même et voilée, nous écouterons la musique des langues inconnues et sauvages qui nous encercleront. Les oiseaux et les arbres nous protégeront du hasard malheureux, ce sera une tendre et jolie fin du monde. Jamais nous ne reviendrons.

15 avr. 2011

l'enfance la muse lasse ;
perles et dentelles
achevant la terre
sont des trous que le ciel échappe
roulent les billes perdues
les gamins la terre, noirs
rien qui ne soit malléable
si l'on a des mains pour se taire
et chercher

24 mars 2011

(ou je)
regarde le mur
lit Beckett
regarde le mur

13 mars 2011

ici beaucoup de poèmes n'ont pas lieu
affairés à n'être pas
autre chose ou dispersés dans les calculs invalides
de la végétation et notre pauvre esprit
devant elle affolé puis las puis affolé, qu'est-ce donc
ses mains de papier perdues sans conscience
cherchant en elle quelque lieu
où être

ici donc, pas de fleurs
laissons-les et nous
ne pas savoir

28 janv. 2011

l'échine se raidit ; il faut lui donner la forme idéale
avant qu'elle ne se fixe, car ainsi elle restera.
cimenter sa posture sans envie il est vrai
mais le ciel tombe
si patiemment, si lentement, lourdement.
il faut penser la liberté, pour être libre.
et alors plus jamais
besoin de voir le ciel.