Carnet

CARNETS | marie deschênes

24 déc. 2008

2 déc. 2008

tu voulais rescaper la qualité monolithique des statures
en fermant les yeux en joignant les cils comme pour une prière obscure
ta candeur ses aveuglements si beaux si beaux les nuages inventés
que tu grimpais sans chaussures le pied au bord du précipice au bord du monde ; naître,
naître par la distance ne pas regarder derrière aller, aller la terre est ronde
chaque fois tu ne reconnais pas le chemin ; cher horizon
les arbres étoilés les rhizomes que tu délies - et pourquoi, donc -
dessin extrait de l'usure de toutes choses ; forme unique ; lien
ah que c'était bon ce vent
rien, rien mais la caresse du mot libre

partir, rester ; pareil

parmi les révolutions suspendues
des astres et des peuples

les navires que tu allumes
sous le plafond définitif
ne sont que fondations tardives

l'ourlet de ta robe est défait
tu répètes des paroles comme des murs
je ne sais pas coudre, dis-tu

tu poses la main sur ce qui s'échappe
sentir la fuite, l'oubli des choses et des gens
est aujourd'hui aimer

19 nov. 2008

peut-être pas des marées
des grands rocs contre lesquels
danser en fracas des aubes
jaillissantes la chute
corps las du ressac
sans jamais définir de quoi il s'agit
mais porter la mer en soi
tout autour

17 nov. 2008

comme par hasard
non rien vraiment
c'est pour structurer un peu l'espace
poser des directions
et les regarder partir

7 nov. 2008

rien à dire ce soir, sauf l'ennui
mais Hector le dit déjà
et beaucoup mieux que moi


Spleen

Ah! quel voyage nous allons faire
Mon âme et moi, quel lent voyage

Et quel pays nous allons voir
Quel long pays, pays d'ennui.

Ah! d'être assez fourbu le soir
Pour revenir sans plus rien voir

Et de mourir pendant la nuit
Mort de moi, mort de notre ennui.


GARNEAU, Hector de Saint-Denys, Poésies. Regards et jeux dans l'espace. Les Solitudes, Montréal, Fides, 1972, p. 65.

4 nov. 2008

fatigue des rétines la surface y creuse
les failles ; épuisement des rigueurs
des puretés il n'y a plus de guerre devenons-nous
engourdis englués soldats coupés sous le soleil
sa marche elliptique dans le chantier des éclats
plus rien pour saisir
l'œil qui s'égraine
d'un coup sec sur le papier glacé
nous sommes d'une autre époque

2 nov. 2008

cela m'intéresse
peu de choses
couleurs et désordres
abandon, fenêtres, joie, distance
directions, sens, mots
(je ne connais rien aux heures, mais nommons-les)
peau, soif, vitesse, mort
ou le contraire

31 oct. 2008

facile l'automne s'assouplit
sous les pas que soulèvent
tes regards près du ciel
où nous nous retrouvons

23 oct. 2008

de vos yeux s'échappent
je me rappelle
des vols d'oiseaux et l'automne
entre nos fenêtres
cette rue de divague
assez morte
pour que tombe l'hiver
en son sein creusé notre lien
un fil parmi le vent
que les oiseaux suivent
pour se retrouver

13 oct. 2008

l'on se répete inlassablement (ce que je fais ici d'ailleurs)

ah que le monde est petit
et comme sa littérature m'ennuie
avec le temps on n'aime plus
et on ne prend pas la peine de le dire
guillaume où êtes-vous
êtes vous toujours mort?
la zone n'est plus ce qu'elle était
j'y dansais petite fille et ce soir
les heures sautillent comme moutons
et je suis lasse d'être bergère
que sais-je?
que sais-je?
aimer à peine, ça je sais
ne pas écrire, aussi, je sais
des livres anciens
je sais les boire et longue
je sais partir
comme eau courante
hélas
comme tout est d'une impossible lenteur
quand donc reviendrai-je?
ivre d'indifférence ivre de vieillesse
noyée lumineuse

12 oct. 2008

l'or et la bruyère
ne se marient
qu'à l'envers
la violence rejaillit d'en dessous des étales
longtemps dormante ses précipices retenus
par les dents et les plaques tectoniques
sous l'eau jusqu'à ne plus tenir

la violence cette rencontre
que tu creuses je m'en fiche
par delà les oublis
autant dire je t'aime
un troupeau qui accoure
dans la pupille le métal de la fuite
je me tais

la mort même si la vitesse
et le neuf étincelant des choses
que nous touchons nous arrondissent
souples un moment comme des voiles légères
la mort – cette brève cette étonnante cette résolue - là est
pressentie dans les coupures la peau
contre le métal
crissant des étoiles
et l'absence d'air

la chambre est silencieuse ça n'a pas d'importance
je hais ton odeur ses errantes
décompositions que tu n'as pas achevées
tu es l'unique fenêtre notre main
de fragments
de verre

je ne connais rien à magritte je n'en veux à personne
seulement je ne m'intéresse pas
aux humains leurs géographies
leurs aplats sanguins et définitifs leurs murs
leurs longueurs de carton

je n'aime pas trop le développement, s'étendre
tu le sais tu m'as tant dévêtue
prendre la place du soleil des horizons
je n'aime pas trop les mots
l'opacité des descriptions
jusqu'au silence tu m'as tant dévêtue
les mots tu le sais je n'aime pas
comment ils nous usent et le paysage

mais comment te laisser partir - t'effacer - sans eux
comment devenir légère et ample et lumineuse
sans les évacuer cette glaise que tu laisses
en faire des poèmes; nettoyer la bouche, l'œil

rien

perdre les limites du corps
– comme si la peau du ventre s'ouvrait se dissolvait dans l'espace, hein –
et devenir vide
dans le monde
entière

7 oct. 2008

j'ai vu cette ignorance
insecte aux nerfs étalés
dans le miroir

il n'y a que peu d'espace parmi ses gestes
parmi les innombrables surfaces de son agitation
opacités éphémères dont le nombre supplante la possibilité
d'une faille

je me tenais là sous l'eau
prête à ouvrir la bouche
ma parole contre les mouches

27 sept. 2008

je ne voudrais pas déranger
ce que nous avons dérobé aux astres
sans les destins et sans les clés
sans la rouille qui les rend
au monde dans l'inexactitude ; la parole
et parfois le silence
a la particularité de nous éloigner toujours
plus de ce qui nous a lancé dans ce que nous sommes
un morceau de verre planté
dans la direction prise

25 sept. 2008

miles à vélo sous les roses
pleine de bonté pour les lignes jaunes
redessine l'ordre du monde la course
des heures contre les points cardinaux
les astres shaken not stirred
éparpillés sous sa jupe
tout s'envole même la lune
limpide et légère comme des pétales de vodka
contre la gorge offerte
à la nuit d'un grand éclat
de rire debout devant
la serrure presque morte
d'avoir vu le bonheur de si près

17 sept. 2008

note à moi-même :

offrir Mon cœur mis à nu, de Baudelaire à tous les gens que j'aime.

*

offrir Mon cœur mis à nu, de Baudelaire à tous les gens que je méprise.

*

Il est impossible de parcourir une gazette quelconque, de n'importe quel jour, ou quel mois, ou quelle année, sans y trouver, à chaque ligne, les signes de la perversité humaine la plus épouvantable, en même temps que les vanteries les plus surprenantes de probité, de bonté, de charité, et les affirmations les plus effrontées, relatives au progrès et à la civilisation.
Tout journal, de la première ligne à la dernière, n'est qu'un tissu d'horreurs. Guerres, crimes, vols, impudicités, tortures, crimes des princes, crimes des nations, crimes des particuliers, une ivresse d'atrocité universelle.
Et c'est de ce dégoûtant apéritif que l'homme civilisé accompagne son repas de chaque matin. Tout, en ce monde, sue le crime : le journal, la muraille et le visage de l'homme.
Je ne comprends pas qu'une main puisse toucher un journal sans une convulsion de dégoût.

Charles BAUDELAIRE, Mon cœur mis à nu

15 sept. 2008

je m'absente ces jours-ci j'écris ailleurs
à des poètes des musiciens
plongée dans l'humeur ancienne des anges et la mélancolie ; je chante
nous sommes en pleine fabrication de rêve, mes amis et moi
les mains à fouiller l'absolu
parcourant ce que l'ivresse laisse derrière elle dans sa course -
la vie est si courte - et nous manquons de papier
pour retenir toute cette musique
revenez me voir ici dans cette fenêtre, ne prenez pas mes adieux
pour des vœux définitifs ;
je ne crois ni en dieu ni en la pérennité des cathédrales
mais au ciel cette transparence
quand à minuit j'y chante
l'aube arrivant d'une voix si légère
que le toit et les murs même s'envolent
la maison n'est que moment
et j'y chante, oui

10 sept. 2008

creux dans le mot ces jours-ci la musique
a la particularité d'habiter sans encombrer
l'espace ses pleins comme ses vides ;
je cherchais le vent je me souviens
au mois d'août je viens de comprendre
le vent par les failles ou sans elles
occupe l'espace en le dégageant

9 sept. 2008

bah et puis merde
je retourne à mes poèmes sans étoiles

ça j'aime

7 sept. 2008

sur ce qui se passe ici

j'ai pensé écrire au nous mais je suis bien seule ici, et je ne me revendique d'aucun groupe, courant ou école de pensée, puisque je n'y suis pas allée, à l'école, je n'y connais rien ; je me revendique de rien, puisque c'est tout ce que je sais et c'est déjà pas mal. je suis donc ici pour rien et pour la poésie, et qu'est-ce que c'est la poésie, ça me passe parfois par les fenêtres quand... il me semble avoir déjà lu ça quelque part. taisons-nous donc, c'est peut-être ce que je dirais au nous. je me tais déjà, vous le savez ; ici je n'y suis que pour ouvrir les fenêtres, toutes et grandes, de la plus coincée à la plus haute, c'est mon petit boulot quoi, je me fais ouvreuse, je libère du verre, je livre de la transparence oui, jusqu'à ce que, peut-être un jour, on ne distingue plus le dedans du dehors

6 sept. 2008

toujours j'arrive
le sein nu contre le ciel
comme si c'était possible
de ne pas s'y perdre
vers toi qui aurait aimé
me trouver dans l'enlèvement
des voiles il n'y en a pas
par la fenêtre ouverte tes mains
affairées dans les transparences
qui nous séparent de si près la nudité
est si longue à saisir

4 sept. 2008

sur les failles

c'est par les failles qu'on connait mieux le monde
par derrière les murs par les trous de serrure
la lumière n'est pas plus dense ou brillante
mais dans le passage elle prend forme
là où normalement sa transparence ne fait que permettre
la surface des choses
par le contraste, on en saisi un peu la substance

les failles permettent donc une double traverse/pénétration - la dynamique
le dedans au dehors, et inversement
la lumière s'offre à l'œil de manière un peu plus exclusive
telle qu'elle est dans son absence de matière
et dans le même geste elle donne à voir en pénétrant
ce qui se refuse, par souci de disparition ou de séduction
instincts qui en fait sont nourris
d'une unique intention

28 août 2008

rien l'homme est venu
prendre un ou deux murs tu ne disais rien
comme une sentinelle tu t'affairais
le long des ébauches des disparitions
aux fenêtres exsangues
l'aube à peine aperçue
ainsi ta nudité s'achève
il faut bien ranger la poussière
faire semblant de n'avoir pas remarqué le ciel
ranger, les lèvres closes, comme après un enterrement
ranger des bibelots, des livres, déplacer des meubles
ouvrir la porte fermer la porte garder ses cheveux noués
au cas où la pluie et le plafond auraient des fuites
des connivences
que faut-il faire avec ce mur dans la bouche
ce soupir dans la main
je parle trop je ne dis rien ma lumineuse faillite
assise dans une autre pièce
pas tout à fait
métaux robes cheveux agités
l'air de rien touchant l'orage
camouflant ma pudeur ma fugitive
joue contre le mur

27 août 2008

que faut-il faire avec ce mur et ce soupir
j'arrive à peine ici dans cet écart
les mains fendues par le brouillard
tu m'avais dit marie les ponts
n'iront plus se perdre ni sans toi
tu peux ouvrir ce qui t'absente
sans craindre les piqûres les avalanches
poses tes mains sur ton ventre et dors

26 août 2008

les lamentations du bourreau

le bourreau plus que tout
aime aimer la lame
astiquée de salive glorifiée
quand juste avant de s'abîmer
dans la mer opaque de la nuque ouverte
un bref instant elle lui renvoie
encore propre son image
comme une apparition sainte
lumineux présage
juste de la mort


*


le bourreau exécute sans poser de questions
l'ignorance est son devoir
sans elle il ne pourrait rien
à son propre salut


*

le bourreau se plaint
le sang de ses victimes salit
ses mains, laisse des traces indélébiles
sur la lame miroitante

25 août 2008

je n'ai pas d'ambition
l'équilibre peut-être
dehors est mon plus long souffle
dès que j'entre quelque part je cherche les fenêtres
j'ai cette mélancolie comme une enfance
l'impression d'être ailleurs et plus tard que ce corps
j'ai au moins 12 enfances je ne suis sûre de rien
en ce moment j'ai 33 ans, 82 ans, 8 ans et demi
c'est un peu confondant quand on me demande
ce que je fais dans la vie j'ai une grande fenêtre
des douleurs irrésolues je n'arrive pas
trop à sentir c'est pour ça que j'écris
j'imagine

24 août 2008

les fenêtres sont sales et sans rideaux
je ne vois pas les voisins donc ils ne me voient pas
l'homme que j'ai quitté écrit des poèmes
dans une chambre que je ne connais pas

23 août 2008

quelquefois tu aimes
parce qu'il faut bien, la tristesse
défait en toi
ce que les lèvres ne trouvent pas
je suis prise
après l'horizon
les lèvres des hommes
ne trouvent plus le chemin de mes chutes
ma trace rouge dans le vent
leurs lèvres pendant que
séville m'est loin
ferment des portes

20 août 2008

aux nymphes et danaïdes
point de portail ; seul
le trépas et le glaive
au cou l'ornement d'horizon
par lequel les sangs filtres
des marins purifient la glaise
et le diamant tu, pris
pour son ombre la mer
confondue par le ciel
l'eau demeure et chante

1 août 2008

la mort est passée
on la sentait dans les absences
imperceptibles des gestes connus
les chats le silence
quelque chose de vague entre eux
qui ne se frôlent pas
la canicule fixe les murs
à la poitrine on n'en sort pas
on peut aller loin c'est pareil
quand on n'y est plus
qu'en dedans
loin des autres

qu'est-ce que c'est que mourir on se demande
qu'est-ce que c'est de ne plus voir
quand on fixe ses yeux sa fatigue son corps
qui se traîne la soif le regard si loin
le moment exact de la chute
le revirement vers rien
où ce que l'on a été et connu, regardé
ne prend plus forme
se perd dans les limites inconnues de la matière

ma main sur sa nuque il m'échappe
rien ne sert de parler les années se réduisent
à cet instant je lui dis que je l'aime
la porte reste ouverte derrière moi
il est par terre et regarde le mur

25 juill. 2008

électrons libres

ça recommence être loin
être ailleurs te happe
comme un vertige un gouffre sous le pied
sans chanceler tu t'éloignes
encore du monde dans l'extase du vide
l'extase de la perte ; l'abandon
ça te prend comme ça de nulle part
ça te vient de plus loin que toi-même
par derrière les années
l'abandon tu n'y peux rien
à la terre aux humains l'accumulation les traces
encore les choses
se dissipent dans une géométrie impossible une géométrie à une face
tu ne crois en rien, il n'y a pas de mots
à poser là-dessus, cette disparition
tu ne sais même pas si c'est le monde ou toi ou les deux
tu doutes même de la mort
quant à la transparence, rien à comprendre, tu t'y tiens
de façon assez approximative, debout
et ça te happe te propulse si loin que tu ne sais plus de quoi
la frontière entre la vie et vivre n'est plus vraiment perceptible
pas trop mais juste pour dire
un peu du bonheur que certains ont la grâce
de partager sans s'en rendre compte, par la limpidité de leurs gestes
on sait leurs matins
ouverts l'œil, la voix minuscule des oiseaux, un lac, deux corps, entre eux l'horizon qui disparait
pas trop mais juste pour dire
on se rappelle avoir déjà vu le jour se lever comme ça
sans faille, sans ombre, entier
j'essaie de me nourrir de peu
le moins possible pour garder le ventre vaste
une résonance jusque dans l'œil
la faim du paysage exacte
dans les mots de ceux qui savent
s'approprier le monde je suis absente
flottant dans du verre brisé m'échappant
par les failles de la transparence

je ne voudrais surtout pas vous perdre
en parlant si peu
je sais mes chemins sont nus je les dépoussière à mesure
que j'avance
derrière moi je n'aime pas laisser de trace
j'aime que vous puissiez y laisser les vôtres
je n'y suis plus

je sais je rêve trop j'essaie
de ressentir chaque chose comme si elle vivait en moi
par souci de justesse et d'humilité
je ne suis mère de rien

trop de temps perdu à recréer en moi
la seconde vivante, à faire en sorte que rien ne s'oublie
puisque la mort est toujours proche

à trop passer de temps à dessiner
à la craie blanche des ciels
que la pluie efface
on finit par perdre la terre de vue

comme ça quand la mort passe
on est déjà ailleurs

13 juill. 2008

je ne sais pas écrire je ne sais pas danser
j'ai la tête qui tangue et toutes les étoiles en tombent
vieilles éteintes sans rivières millénaires et sans lune
des étoiles de verre fracassé moi je ne sais rien
à part les failles du ciel et le chant imperceptible des marées
je ne comprends rien aux routes ni aux années
emmêlée dans mes marelles déroutée par les heures et les rêves
impatiente comme toujours
attendant
par la fenêtre la fin de ce monde

(tristesse)

il aurait fallu naître ailleurs
il aurait fallu naître avant, il y a longtemps
quand tout était à faire
il aurait fallu naître vieille déjà
autrement que dans ce corps
avec autre chose que la beauté et la violence
il aurait fallu commencer par mourir
et naître de plus en plus à chaque année

(calme)

nous disparaissons
par la saturation
trop de mots trop de paroles
nous devenons opaques
embrouillés de corps de lumière
nous mourons par accumulation
sous l’épuisement de vouloir

nous ne reposons
sur rien, sous le sol
il n'y a que terre
sous terre il n'y a que sol
rendu à ce sol, notions de dessus
et de dessous se confondent
au vide ; sans sens
la terre repose
pendant que nous disparaissons
dans les campagnes vides
les villes noyées
d'inlassables ignorances

(courage)

relève-toi guerrière
tu as le front usé
des forteresses imprenables
le petit clou rouillé qui te maintient en toi
a pris l'allure d'un siècle
tu vois le jour tenant
à peine hors de toi - défaite
la forteresse

12 juill. 2008

fat free peña

morceaux de petenera



oui d'ac je me force pour faire une vidéo moins nulle. promis.

24 juin 2008

vrac

où êtes-vous maintenant
vous qui pour moi
lisiez les oracles les journaux les formules scientifiques les statistiques
pour m'en faire des éclats de lumière brefs et drôles
des jeux sans règles sans but sans joueurs
sans papier jamais nos poèmes de rien
où êtes-vous je ne sais pas lire
sans vos mains
j'ai la tête qui tangue et toutes les étoiles en tombent
vieilles éteintes sans rivières millénaires et sans lune
des étoiles de verre fracassé moi je ne sais rien
à part les failles du ciel le chant imperceptible des marées
par cœur
où êtes-vous je ne comprends rien aux routes ni aux années
emmêlée dans mes marelles
et les rêves dans mes cheveux silencieux
à l'aube vite rangée
impatiente comme toujours attendant
par la fenêtre la fin de ce monde
et vous que je n'ai jamais connu
que par vos absences les traces
que nous osions

qui prendra votre place
ses horizons échappés

il fait froid vous êtes mort
il y a près de moi un espace clos
qui ne contient rien
un trou noir à mes côtés
je marche
les paysages s'usent
l'ourlet de ma robe est défait
adieu
je ne rentrerai plus
les fenêtres sont demeurées
ouvertes derrière moi

18 juin 2008

vos mains firent trêve
au cœur des bourrasques
à peine vous fûtes sans le savoir
pendant une heure toute ma vie

9 juin 2008

Le jeudi 19 juin 2008 à 22 heures, au Dièse Onze sur la rue St-Denis
dans le cadre de L'Off Festival de Jazz de Montréal
seront jouées les compositions d'Isaiah Ceccarelli sur, entre autres, quelques-uns de mes poèmes




j'aimerais beaucoup vous y voir

30 mai 2008

des heures à scruter le vide
la perspective de voir bouger
un atome le rend intarissable

28 mai 2008

nous disparaissons
par l'expérience des routes
cherchant le centre en périphérie
l'ennui des espaces vacants
que nous sommes
vagues trébuchant
la ligne sautée
des pierres mortes
sans le dire

27 mai 2008

la parole est ta plaine brûlée
à naître entre les secousses
des légèretés
sont d'autres blessures
l'architecture cambrée des effondrements
l'échine enfouie dans la terre
resplendissant noyau des mers

il ne faut pas craindre l'oiseau qui meurt
sa robe rouge et brève
son chant d'aiguille
qui scrute les lassitudes
ses dernières éternités

23 mai 2008

ce geste presque rien
sa main devenue forte et calme
ma taille soudain souple, offerte
puis rien, rien sa silhouette
disparaissant dans la pénombre
et la porte qui se ferme

et ce geste toute la nuit
presque rien
qui se déploie

21 mai 2008

que fais-tu ici
dans l'espace que tu n'as pas encore créé
que cherches-tu dans les possibles
et la mélancolie cherches-tu à devenir
un peu plus tangible un peu moins
loin du monde
que fais-tu ici
une fenêtre de quel côté de la fenêtre
es-tu

16 mai 2008

pour s.

la nuit passée tu étais là
la marée était si haute dans la nuit
qu'elle submergeait presque le quai
la fascination créée par les niveaux
du sol et de l'eau confondus
nous enlevait la peur
au loin les arbres noirs
étaient secoués par les vents opposés qui se croisaient
et quand la neige tomba lourde et lente
je vis ton dos nu se cambrer avec force
et j'entendis les cordages grincer autrement
la mer était blanche

13 mai 2008

il faudrait s'approprier les choses un peu plus
décrire le monde
au lieu de le ressentir

il faudrait être plus ponctuelle
moins déroutée par les heures
perdre moins de temps dans les marelles

il est trop tard pour dieu
l'ignorance m'échappe
les rêves arrivent

4 mai 2008

bibelot quelconque
corps sans gravité
d'un état gazeux à un autre
trébuchante conscience
l'humanité dissoute
par les fenêtres
et le mystère aboli

3 mai 2008

comme l’eau est humble et inventive
elle n’aborde la feuille ni la bouche
jamais de la même façon
sa transparence est sibylline ;
elle procède, mais demeure
porteuse des pays qui sont passés par elle

2 mai 2008

rien n'importe tout est indifféremment unique
les bruits se fondent aux âmes
aux secousses tranquilles de ne pas exister
et l'on retient de tout ça
un morceau d'immensité
la même chose en plus petit
ah mortels et libres
à s'enfuir à courir sur terre quelle blague
on ne fuit rien on se rapproche toujours de ce que l'on fuit la terre est ronde
mais il y a aussi la légèreté
suspension à rien le sens perdu
les improbables directions
parmi les étoiles et ce qu'on ne sait plus
tourner en rond redevient abstrait
et la terre a la forme de nos têtes

1 mai 2008

les sanglots sont ce qui reste
les sanglots retenus demeurent
chauds et vivants les sanglots
sont ce qui reste

28 avr. 2008

tu as la voix
des rocailles souples
que le ressac
a su apaiser
tu as le regard
profond des sources pures
dont la surface se livre
se noue à l'ouverture
abondance de l'accueil

24 avr. 2008

les adieux n'ont écho
d'aucune ruine semblable
au silence on ne peut enlever
rien, en fait
et le ciel
que demeure
enfin la liberté

22 avr. 2008

tu cherches un miracle parmi le silence
les espaces vides
dont tu es faite
accélèrent
ton corps s'achève
le ciel n'a rien ton corps ses limites
se perdent aux regards de travers
tu deviens parmi les fuites
plus transparente que
par où les atomes se scindent
tu as les travers de la clarté
à te faire mentir à noyer tes ciels
dans les friandises infectes des aveugles
tu ne comprends rien à ce corps
ses ballotements

13 avr. 2008

hiérarchies

nous ne reposons
sur rien, sous le sol
il n'y a que terre
sous terre il n'y a que sol
rendu à ce sol, notions de dessous
et de dessus se confondent
au vide ; sans sens
la terre repose

3 mars 2008

nous aurons l'or des fugitifs
ce dont personne ne veut
car personne ne le possède
nous aurons l'indifférence de l'eau
ses déroutes nombreuses et lisses
l'envergure pour toute chose
nous n'appartiendrons pas
au monde libres
et absents notre souffle
dans les campagnes vides
des villes noyées
d'inlassables ignorances
nous aurons le silence
la connaissance de la mort
à répéter

25 févr. 2008

lettre à moravagine

Entre ma cervelle, le monde et la mort, il n’y a qu’un point de fuite. Le genre humain ne m’intéresse ni m’étonne, l’idéal gavé de petits hors-d’œuvre de liberté hachée menue, la panse pleine d’illusions indigestes. Je lui préfère les grands espaces vides d’insomnie, les lunes limpides couleur vodka, la dépossession des départs urgents et définitifs. J’ai un aéroport noué dans la gorge, bruyant et venteux comme des mots retenus qui bourdonnent dans ce sommeil où je me tiens comme encore vivante. Partir. Vers quelque approximation, comme l'ivresse, un pays, ou un homme, là où je deviendrai sereine, là où ma cervelle se détachera de mes yeux, et je m'en remettrai à la vitesse, laissant la réalité déraper dans l'imaginaire, et inversement. Il faut anéantir l'empathie et la résignation, devenir action brute, une perte de mémoire qui s’affine plus à chaque chute, à chaque démesure.
Le temps est venu de ne plus croire en rien, le temps est venu de tuer tout espoir. Ne plus regarder devant, ne plus regarder derrière, mais être, partout et nulle part, quitter l’épuisement de vouloir, devenir plus brève que la mort.

23 févr. 2008

ee cummings

somewhere i have never travelled, gladly beyond
any experience, your eyes have their silence:
in your most frail gesture are things which enclose me,
or which i cannot touch because they are too near

your slightest look will easily unclose me
though i have closed myself as fingers,
you open always petal by petal myself as Spring opens
(touching skillfully, mysteriously) her first rose

or if your wish be to close me, i and
my life will shut very beautifully ,suddenly,
as when the heart of this flower imagines
the snow carefully everywhere descending;
nothing which we are to perceive in this world equals
the power of your intense fragility: whose texture
compels me with the color of its countries,
rendering death and forever with each breathing

(i do not know what it is about you that closes and opens;
only something in me understands
the voice of your eyes is deeper than all roses)
nobody, not even the rain, has such small hands

18 févr. 2008

dans la connaissance exacte du désespoir
du rétrécissement de la perspective
par laquelle s'infiltre, dans la clémence
d'un possible printemps
le genre humain et sa littérature
m'ennuient

(où il y a manque lisez une question,
ne lisez plus)


le sens n'en a pas
questions et réponses sont de même nature
il n'y a qu'action qui vaille

14 févr. 2008

lettre à un plagieur

je viens de tomber là dessus en fouillant dans les archives de mon ancien blog, la carneceria. j'avais écrit cette lettre alors qu'un type se plaisait à publier de mes textes (et ceux de patrick brisebois, il me semble, et quelques autres poètes) sous son nom.
je constate qu'il m'arrive parfois de sortir ma langue de ma poche.


pour la forme
vous prenez vos lassitudes en hors d'oeuvre de chair tendre sur le dos des autres
votre robe de viande morte vous sied si bien
vos orbites vides délectées de voir mourir
nos vies le souffle entre vos doigts
serpents
tordus d'envie
d'être autre chose qu'une queue

en trou noir buvez votre soif
jusqu'à la vermine
à l'heure où les aurores ne vous nommeront plus

pissez-vous dessus de longues coulées pour vous laver les mains

le génie est trop près de l'humilité
pour vous en faire un éclat de lumière
au fond des couilles
sans que ça brûle

13 févr. 2008

l'on veut qu'ici achève
ce qu'ici débute

questionnons la liberté
dans ce qu'elle est de physique ;
dehors se résume en soi

les révolutions se répondent
par les miroirs
que l'on voudrait fenêtres

sommes-nous séparés
par notre reflet

11 févr. 2008

cher onirisme

tranchée l'hiver le long grain de ma peau
un hiver de cent ans et quelques siècles et vous
vos bourgeons encore y sont nocturnes
résistant à l'éveil à la mort
qui sommes-nous à peine éclos
sommes-nous traversés
de sève un pont entre la terre
et le ciel notre bouche
irons-nous vers quelle fin

gardons le geste intact ;
ne la nommons pas

5 févr. 2008

dehors

rien à dire. rien à écrire. rien à danser.
je ne veux qu'espace, que sortir, liberté.
pouvoir dire, ou ne pas dire, rien
comment/pourquoi dire? comment créer de l'espace, du silence, ouvrir les possibles?
je n'ai pas envie d'emplir, j'en ai marre du bourdonnement des paroles, j'en ai marre de l'opacité de l'à dire, du moi, du vous, des grands cris inaudibles de la nécessité, personne n'écoute, l'on se répète inlassablement, qu'est-ce que nous sommes cons, minuscules dans l'impossible lenteur du déploiement des choses, notre perspective en abîme, notre misérable tentative d'appartenir au monde.
je n'ai pas envie de répéter, ignorante et sourde. tout est là, sortons de nous-mêmes. j'aimerais [donner] la possibilité d'écouter, de voir.
la parole a-t-elle du sens, est-elle possible? faut-il sans cesse répéter, ajouter des couches à l'opacité? faut-il se taire?
dire ne mène nulle part
qu'en soi-même
ici je m'achève

30 janv. 2008

ici sec
à dire
les bras ouverts
du vent
tu parles pour qui
te taire tu crois
n'est pas l'issue

21 janv. 2008

la danse et l'écriture sont irréconciliables, rien à faire
elles ne sont pas de la même nécessité
dans la mathématique excessive des déplacements
l'implosion engendrée des pulsations ; le noyau, qu'y-a-t-il
à part lui dans tous ses possibles
la danse ne nomme pas
des choses elle ne voit que la vitesse
la mobilité
par la multiplicité de l'horizon
l'infini variable des répétitions
polymorphie de l'unique
rien qui ne reste
(aux ici)
elle prend part

10 janv. 2008

les vers leur soie opaque
de ma tristesse
crainte la démêlée
lue sans vous

ne pas écrire
ici dans le tissage des sangs
ni dedans ni dehors
ce que vous êtes

la main s'use à aller
nulle part
trop souvent sans partir
encerclée d'horizon

l'usine a remplacé la chambre
on y filtre l'eau ses complications
elle fuit libre dans les failles
l'on conserve ce qui reste

les labyrinthes transparents
évités se cumulent
quelque part