Carnet

CARNETS | marie deschênes

27 sept. 2008

je ne voudrais pas déranger
ce que nous avons dérobé aux astres
sans les destins et sans les clés
sans la rouille qui les rend
au monde dans l'inexactitude ; la parole
et parfois le silence
a la particularité de nous éloigner toujours
plus de ce qui nous a lancé dans ce que nous sommes
un morceau de verre planté
dans la direction prise

25 sept. 2008

miles à vélo sous les roses
pleine de bonté pour les lignes jaunes
redessine l'ordre du monde la course
des heures contre les points cardinaux
les astres shaken not stirred
éparpillés sous sa jupe
tout s'envole même la lune
limpide et légère comme des pétales de vodka
contre la gorge offerte
à la nuit d'un grand éclat
de rire debout devant
la serrure presque morte
d'avoir vu le bonheur de si près

17 sept. 2008

note à moi-même :

offrir Mon cœur mis à nu, de Baudelaire à tous les gens que j'aime.

*

offrir Mon cœur mis à nu, de Baudelaire à tous les gens que je méprise.

*

Il est impossible de parcourir une gazette quelconque, de n'importe quel jour, ou quel mois, ou quelle année, sans y trouver, à chaque ligne, les signes de la perversité humaine la plus épouvantable, en même temps que les vanteries les plus surprenantes de probité, de bonté, de charité, et les affirmations les plus effrontées, relatives au progrès et à la civilisation.
Tout journal, de la première ligne à la dernière, n'est qu'un tissu d'horreurs. Guerres, crimes, vols, impudicités, tortures, crimes des princes, crimes des nations, crimes des particuliers, une ivresse d'atrocité universelle.
Et c'est de ce dégoûtant apéritif que l'homme civilisé accompagne son repas de chaque matin. Tout, en ce monde, sue le crime : le journal, la muraille et le visage de l'homme.
Je ne comprends pas qu'une main puisse toucher un journal sans une convulsion de dégoût.

Charles BAUDELAIRE, Mon cœur mis à nu

15 sept. 2008

je m'absente ces jours-ci j'écris ailleurs
à des poètes des musiciens
plongée dans l'humeur ancienne des anges et la mélancolie ; je chante
nous sommes en pleine fabrication de rêve, mes amis et moi
les mains à fouiller l'absolu
parcourant ce que l'ivresse laisse derrière elle dans sa course -
la vie est si courte - et nous manquons de papier
pour retenir toute cette musique
revenez me voir ici dans cette fenêtre, ne prenez pas mes adieux
pour des vœux définitifs ;
je ne crois ni en dieu ni en la pérennité des cathédrales
mais au ciel cette transparence
quand à minuit j'y chante
l'aube arrivant d'une voix si légère
que le toit et les murs même s'envolent
la maison n'est que moment
et j'y chante, oui

10 sept. 2008

creux dans le mot ces jours-ci la musique
a la particularité d'habiter sans encombrer
l'espace ses pleins comme ses vides ;
je cherchais le vent je me souviens
au mois d'août je viens de comprendre
le vent par les failles ou sans elles
occupe l'espace en le dégageant

9 sept. 2008

bah et puis merde
je retourne à mes poèmes sans étoiles

ça j'aime

7 sept. 2008

sur ce qui se passe ici

j'ai pensé écrire au nous mais je suis bien seule ici, et je ne me revendique d'aucun groupe, courant ou école de pensée, puisque je n'y suis pas allée, à l'école, je n'y connais rien ; je me revendique de rien, puisque c'est tout ce que je sais et c'est déjà pas mal. je suis donc ici pour rien et pour la poésie, et qu'est-ce que c'est la poésie, ça me passe parfois par les fenêtres quand... il me semble avoir déjà lu ça quelque part. taisons-nous donc, c'est peut-être ce que je dirais au nous. je me tais déjà, vous le savez ; ici je n'y suis que pour ouvrir les fenêtres, toutes et grandes, de la plus coincée à la plus haute, c'est mon petit boulot quoi, je me fais ouvreuse, je libère du verre, je livre de la transparence oui, jusqu'à ce que, peut-être un jour, on ne distingue plus le dedans du dehors

6 sept. 2008

toujours j'arrive
le sein nu contre le ciel
comme si c'était possible
de ne pas s'y perdre
vers toi qui aurait aimé
me trouver dans l'enlèvement
des voiles il n'y en a pas
par la fenêtre ouverte tes mains
affairées dans les transparences
qui nous séparent de si près la nudité
est si longue à saisir

4 sept. 2008

sur les failles

c'est par les failles qu'on connait mieux le monde
par derrière les murs par les trous de serrure
la lumière n'est pas plus dense ou brillante
mais dans le passage elle prend forme
là où normalement sa transparence ne fait que permettre
la surface des choses
par le contraste, on en saisi un peu la substance

les failles permettent donc une double traverse/pénétration - la dynamique
le dedans au dehors, et inversement
la lumière s'offre à l'œil de manière un peu plus exclusive
telle qu'elle est dans son absence de matière
et dans le même geste elle donne à voir en pénétrant
ce qui se refuse, par souci de disparition ou de séduction
instincts qui en fait sont nourris
d'une unique intention